Le mot Marill(e) en Autrichien veut dire Abricot.

(Agrandir la photo ci-dessus !)

Faites donc un petit tour dans cette distillerie : http://www.bailoni.at/index2.htm



Le festival du Marille à Krems ! : http://www.allesmarille.at/index.htm

 

LES MOTS VAGABONDS - CHRONIQUE / (12/10/2003) - L’abricot a fait le tour complet de la Méditerranée

La plupart des fruits et légumes cultivés en Europe ne sont pas autochtones, mais venus de l’Est — Proche-Orient, Inde, Asie centrale, voire même Extrême-Orient. C’est par l’intermédiaire de l’arabe que nous sont parvenus les mots abricot, aubergine, épinard, artichaut, pastèque, caroube et orange. Mais la règle des flux est-ouest a aussi son exception. L’abricot est l’exemple d’un mot latin qui nous est revenu, méconnaissable, après un détour chez les Sarrasins.

Comme ces fruits venaient des frontières orientales de l’Empire, les Romains appelaient la pêche «pomme persane» (malum persicum, puis persica tout court) et l’abricot «prune arménienne» (pruna armeniaca). Persica a donné pesca en italien, pessego en portugais et pêche en français, (d’où l’anglais peach), alors qu’en Allemagne elle évoluait en Pfirsich. Paradoxalement, la forme latine s’est le mieux conservée dans les langues du nord: perzik en néerlandais, persik en russe, persikka en finnois — mais aussi persigh en dialecte tessinois.

La provenance arménienne de l’abricot ne survit qu’en Vénétie, où le fruit se nomme armellino. Ailleurs en Italie ermellino désigne l’ancien «rat d’Arménie» que nous appelons hermine (mot issu d’arménine). Au Portugal, l’abricot (damasco) porte le nom de la ville de Damas comme la prune damassine chez nous (voir notre billet de la semaine dernière).

Les anciens Romains ont vite remplacé le terme «prune arménienne» par l’expression «pêche précoce» (persica praecoquia). Elle est devenue prekokion en grec byzantin, avant de se muer en verikoko en grec moderne . Les Arabes d’antan l’ont empruntée sous la forme barqoûq qui aujourd’hui désigne encore l’abricot en Irak (mais la prune ailleurs). Dans l’Andalousie médiévale, les Espagnols ont transformé al-barqoûq (al étant l’article) en albaricoque.

La version catalane albercoc explique la forme italienne albicocco sous laquelle praecoquia est revenue à Rome, son point de départ. Elle est aussi à l’origine du vieux français aubercot. Devenu abricot, ce dernier a essaimé à son tour en Angleterre (apricot), en Hollande (abrikoos) et en Allemagne (Aprikose), et de là en Scandinavie et en Russie.

Pour les Iraniens, l’abricot est simplement une «prune jaune». L’association avec cette couleur a aussi joué en Europe centrale. Le bas latin amarellus signifiait «jaune couleur de bile» (d’où l’espagnol amarillo). A Vienne, l’abricot se dit Marille. Le mot s’est diffusé dans l’Empire austro-hongrois, allant de la marelica slovène à la morela polonaise. (Alain Pichard)